Rotters Damn

Son nom a beau sonner british et évoquer une célèbre cité batave, c’est bien dans le sud-Mayenne que le quatuor se forme, l’aube de l’année 2011. Alors étudiants, Corentin Giret, Antoine Gandon, Nicolas Bir et Timothée Gigan Sanchez décident d’unir leur amour du folk et du rock au sein de Rotters Damn. Les quatre, la vingtaine à peine entamée, ne chôment pas et enregistrent une première démo à l’été 2011 : celle-ci a peut-être la fragilité des ébauches, mais le sel de leur musique est déjà là, guitare sèche et voix burinées élargissent l’horizon vers de grands espaces teintées d’americana. Dès 2012, quelques belles scènes locales les accueillent, et de tremplins en petits festivals, Rotters Damn laisse une première empreinte dans le paysage rock mayennais. Au printemps 2013, leur premier EP, “Circus and Trains”, ne laisse plus guère de doute aux oreilles aguerries : ce folk-rock indompté a la puissance d’une ruée vers l’or où les pépites coulent à flot, portées par un souffle rauque, des rythmiques aventureuses et des trésors mélodiques. L’occasion pour le groupe de s’offrir une première tournée estivale, couronnée par un passage marquant dans le bien nommé Terra Incognita : leur nom côtoie ceux de Yeti Lane ou La terre tremble!, à l'affiche de ce festival parfaitement défricheur. L'année 2014 est celle de la confirmation : finales de tremplins régionaux, résidences, concerts, sessions studio et sortie à l'automne d'un second EP, “Objections”, sous la houlette de l'ingénieur du son Thomas Ricou. 2015 lui emboîte le pas dans les courbes ascendantes d'une progression résolue mais patiente, mûrie avec une sagesse de vieux cow-boys : on préfère ici enflammer le cœur des mélomanes que brûler les étapes. Mais le talent finit toujours par éclore et élargir son auditoire : Rotters Damn remporte le tremplin départemental Les Émergences, le 28 février 2015, devant un vaste public et un jury de professionnels conquis. Plus personne n'ignore la conquête de l'ouest du groupe, qui bientôt gagne aussi Bordeaux, Lyon, Paris ou Strasbourg lors d'une tournée hexagonale avec les copains de Throw Me Off The Bridge. Même l'historique Rock & Folk prend la mesure de ces beautés folk-rock et loue dans ses pages la “force magnétique” des chansons du quatuor. À l'été 2015, Antoine Gandon quitte la basse après quatre belles années et passe le relais à Thomas Dilis (Puzzle, Calvaiire, Hourvari). Le nouveau bassiste apporte sa tignasse légendaire et son back-ground orienté post-rock pour étoffer un peu plus la palette musicale du groupe, qui se produit au prestigieux Carré, Scène nationale de Château-Gontier, le 30 octobre 2015, puis entame 2016 sur les chapeaux de roue : résidence et concert au 6PAR4, à Laval, deux ans après leur premier passage aux cotés des anglais de Buriers. Dans la foulée, les quatre compères peaufinent la scène, leur set et leur son au sein du dispositif Le Grand Atelier, résidence de plusieurs mois coordonnée par l'association mayennaise Tribu Familia. Après deux EP épuisés et plus de 120 concerts en 5 ans, l'heure du tant attendu premier album a sonné. Enregistré en septembre 2016 au studio The Apiary, par Amaury Sauvé, “But my friend you know that I think I love you” fait jaillir de nouveaux joyaux de ces terres folk-rock arpentées en maîtres. Moins bruts, plus ciselés, truffés d'arrangements et de contre-chants, façon Bon Iver ou Other Lives. On entend ici une trompette morriconienne chauffée au soleil de l'Arizona, là un piano entêtant, parfois encore des ascensions héritées du post-rock ou la fougue poétique d'un Bertrand Cantat habité. Huit titres qui explorent de nouvelles pistes tout en poursuivant le fil rouge d'une musique aujourd'hui reconnaissable entre mille. La sortie de l'album, prévue pour avril 2017, sera le point d'orgue d'une riche année pour le groupe, puisque le 6PAR4 a choisi, en 2017, d'accompagner le projet au sein du dispositif Ça part en live. À ce rythme, nul doute qu'on saura bientôt mieux situer Rotters Damn sur une carte que son homonyme hollandais. Par Yoan Le Blévec, journaliste Booking : lesrottersdamn@gmail.com